C’est quoi la valeur?

Photo de Ian Schneider sur Unsplash
Photo de Ian Schneider sur Unsplash

Depuis des années, j’accompagne des équipes et des organisations dans leurs transformations (ou évolutions), et je n’ai de cesse d’essayer de les amener à créer plus de valeur. Certains diront même que c’est ma marque de fabrique…. au point qu’ils arrivent à reconnaitre mes post its dans un tableau blanc virtuel partagé à toute une assemblée (n’est-ce pas Laurent Morisseau).

J’essaye de ne jamais donner de réponse à la question: « De quelle valeur tu parles? » Car c’est tellement dépendant du contexte, que je préfère que chacun se fasse sa propre définition.

Alors, pourquoi écrire un article sur le sujet me direz-vous? Et bien car plus le temps passe, plus j’essaye de moi même mettre un nom derrière cette notion de valeur. Afin de pouvoir rationaliser mes apports aux communautés. Afin d’être capable d’identifier le moment où ma production de valeur est en déclin… Mais également parce que je travaille sur un prochain sujet de conférence et atelier qui je l’espère sera inspirant et qui traite entre autre de cette notion comme d’un élément volatile.

J’ai récemment eu la chance de participer à des échanges autour de l’entreprise agile, et dans les discussions revient régulièrement la notion de valeur business… ou valeur du business… Mais là encore, je trouve qu’on reste sur une notion.

La valeur des choses correspond-elle à l’utilité qu’on va avoir de ces choses? La valeur d’un produit correspond-elle à un usage du produit? Sur le court terme, le moyen ou le long?

Quelle valeur donne-t-on au processus de création? Quelle valeur donne-t-on aux interactions humaines qui ont amené à la création de ce produit?

Valeur monétaire ?

Photo de Steve Johnson sur Unsplash
Photo de Steve Johnson sur Unsplash

Si on parle de la valeur monétaire d’un produit, si on est capable d’identifier la valeur monétaire qu’apporte une fonctionnalité d’un produit, il est souvent plus aisé d’aborder cette notion avec les décideurs.

Malheureusement, je suis rarement en contact avec des équipes qui ont la capacité de poser une valeur monétaire sur les fonctionnalités de leur produit logiciel. Pour être honnête, je ne me souviens plus si j’ai un jour rencontré un PO capable de me dire que son produit n’avait, au niveau de la valeur produite, que la notion monétaire.

D’aucun pourrait arguer que tout peut se transformer en valeur monétaire… C’est parfois vrai. Une application industrielle, par exemple, qui aurait comme objectif de faire gagner du temps aux opérateurs sur une chaine de montage, serait plus facilement transposable en 100% de valeur monétaire : toute minute gagnée grâce à l’application sur la chaine de montage fait gagner X K€, tout défaut évité dans le montage fait économiser YK€ et ainsi de suite.

Mais l’équation est rarement aussi simple.

La valeur pour les utilisateurs.

Photo de Kelly Sikkema sur Unsplash

Mais alors, faisons plus simple : déplaçons le problème : demandons aux utilisateurs de choisir eux même la valeur qu’ils donnent aux fonctionnalités.

C’est vrai qu’on sort le problème de valorisation de la responsabilité de l’équipe agile en le reportant sur les utilisateurs… enfin, sur les personnes en charge de la relation avec les utilisateurs et notamment dans l’animation de l’atelier de valeur relative… Comme le dirait Henrik Kniberg, je ne sais pas ce qui a plus de valeur entre une pomme ou une fraise mais je sais que la fraise a meilleur gout pour moi et que la pomme me remplira plus l’estomac… donc je dois pouvoir choisir non (voir la vidéo : https://youtu.be/502ILHjX9EE?si=0YTlxaWN11HOQc1e) ?

Ben non… les utilisateurs se retrouvent souvent dans des situations irrésolvables : préfèrent-on avoir une jambe en mousse ou des dents en bois? Et ce, quand on réussit à leur faire comprendre l’aspect relatif de la valeur…

Bon, alors on oublie la valeur utilisateurs? Non plus. On ne peut pas oublier les utilisateurs, c’est l’essence même de la démarche agile : remettre les utilisateurs au centre des préoccupations des équipes de création logicielle…

La valeur connaissance.

Photo de Michaela Murphy sur Unsplash

OK, donc, le temps d’acclimater nos utilisateurs à l’aspect relatif de la création de valeur, nous pouvons travailler à la valeur connaissance. Cette valeur nous permet de prioriser les travaux à faire en début de projet qui nous permettrons d’en apprendre plus sur la technologie, sur le besoin et sur les utilisateurs.

Je suis en phase, à défaut de connaitre la valeur utilisateur créons de la valeur pour l’équipe.

En ça, je trouve que nous avons fait pas mal de progrès ces dernières années. Je rencontre de plus en plus d’équipe qui utilisent des pratiques de Slack Day, Spike ou POC et qui n’hésitent pas à remonter au PO/PM qu’ils ont besoin d’aller chercher de la connaissance.

La valeur qualité.

Photo de sameer Ali sur Unsplash
Photo de sameer Ali sur Unsplash

Mais si nous arrêtons ici la réflexion, nous passons encore à côté d’autres notions… Notamment la valeur qualité… En effet, parfois nous devons choisir entre mettre en ligne de nouvelles fonctionnalités ou consolider celles en place afin d’améliorer la qualité du produit que nous avons conçu jusque là.

Mais comment valoriser ce travail auprès du responsable de la priorisation? Depuis quelques années, j’appuie sur la notion de Dette Technique et de la complexité associée au fait de la faire reconnaitre par le PO/PM. C’est notamment pour cela que j’ai ressorti dernièrement, avec le GAG, l’outil AntiDette sur lequel j’avais commencé à travailler en 2017. Ce n’est d’ailleurs pas le seul outil à mettre en exergue cette notion, je vous renvois vers l’atelier DTC (Dette Technique Challenge) d’Alexandre Boutin.

Mais encore une fois, tout ne peut pas être évalué uniquement sur la qualité.

La valeur RSE.

La notion RSE s’est fait une place de choix dans les mentalités et notamment dans les préoccupations des individus composants les équipes agiles. Le Green IT a le vent en poupe, l’économie de la fonctionnalité (lue par le prisme RSE) est également souvent abordée.

Loin d’être anecdotique, les aspects sociétaux et environnementaux doivent faire partie de l’aspect décisionnel autour de nos produits. Nous voyons de plus en plus de visions produit mettre en avant ces préoccupations et les stratégies des grosses entreprises sont régulièrement teinté de ces valeurs.

La valeur humaine.

Photo de Desola Lanre-Ologun sur Unsplash

Pleinement et ouvertement mise en avant par la plupart des agilistes (surtout ceux de la première heure), la valeur humaine est cependant rarement prise en compte dans la priorisation des actions des organisations.

Cependant, lorsqu’elle peut être évaluée au delà des aspects RSE, cette notion est primordiale dans l’accompagnement à la transformation (ou évolution). L’impact humain des actions d’amélioration continue se doit d’être réfléchi. C’est notamment, en théorie, le rôle de tout bon manageur du changement de prendre cet aspect en compte. Mais j’ai souvent rencontré aussi l’aspect humain des user stories d’un produit…

Imaginez un produit dont le but est de faire gagner du temps à ces utilisateurs. Imaginez ensuite que ces dits utilisateurs soient des opérateurs ultra spécialisés d’une chaine de production de valeur.. si vous automatisez leur travail à outrance auront-ils encore une plus value à proposer à leurs clients / patrons?

La valeur conviction individuelle.

C’est sans doute la plus difficile à prendre en compte, et je ne l’ai personnellement considéré que lorsque j’ai du choisir d’intervenir ou pas pour certains types de clients.

Mes convictions n’empêcheront de travailler pour une société militaire ou d’armement, au même titre que pour une société destructrice de l’environnement.. mais c’est un choix individuel. Cependant, je peux imaginer que, parfois, les convictions personnelles puissent être prises en compte dans la priorisation d’actions d’une organisation… à condition que les personnes la constituant soient alignées sur ces convictions.

Un mix de valeurs ?

Photo de Bernd 📷 Dittrich sur Unsplash

J’ai tenté de détailler les différentes valeurs que je peux rencontrer lors de mes accompagnements afin de montrer à quel point la notion peut être à la fois abstraite mais centrale à la réflexion autour des transformations, priorisations…

Mais donc, que faire de tout ca? Déjà, si vous êtes arrivé à ce moment de ma diatribe, c’est que vous avez soit un appétit pour le non sens, soit parceque ce que je vous raconte depuis le début vous parle.

Je ne pense pas qu’on puisse s’arrêter sur un seul type de valeur pour diriger nos actions. Il nous faut mixer les différentes notions.

Au niveau projet / produit, je trouve l’utilisation du WSJF comme une bonne première approche autour de la priorisation par la valeur.

Quand on parle des transformations / évolutions, mon instinct me dit qu’il faut trouver un équilibre dans toutes les notions. Explorer la notion de Kaizen pourrait sans doute amener plusieurs réponses utiles.

Je considère que mon rôle dans mes accompagnements n’est pas d’amener une réponse définitive à la question : « Qu’est ce que la valeur? » mais bel et bien des pistes qui permettrons aux décideurs de choisir comment orienter leur stratégie vers de la création de valeur qui ait du sens pour eux.

Si vous êtes arrivés à la fin de cet article, n’hésitez pas à venir sur Linked In me dire ce que vous pensez de cette exploration, les choses sur lesquelles vous n’êtes pas d’accord, les oublis… Vous pouvez aussi m’indiquer quelles sont les notions que vous souhaitez que j’approfondisse dans un prochain article.

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